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GBC500 - Être dépaysé dans sa cour arrière

par Julien Tozzi
Prologue

Les discussions au cours des derniers mois avec les membres de ma famille, amis et collègues ressemblaient pas mal à ça:

Moi: Salut, comment ça va? 

Interlocuteur: Ça va bien et toi?

Moi: Bien merci.

Interlocuteur: Super! Quoi de neuf avec toi?

Moi: Bien, je me suis inscrit au GBC500!

Interlocuteur: GBC500, c’est quoi ça?

Moi: Gravel Backpack Challenge 500km! L'événement consiste en un parcours de 500km en Estrie sur des routes de campagne en gravier. Nous aurons 5 jours maximum pour compléter le tout et nous traînerons tout ce dont nous aurons besoin pour subsister sur nos vélos.

Interlocuteur: C’est quoi un Gravel Bike?

Moi: Ça ressemble à un vélo de route, mais avec des pneus plus proches de ce qu’on va trouver sur un vélo de montagne. L'empattement est également plus long que sur un vélo de route, ce qui donne plus de stabilité dans les descentes techniques. Ça nous permet de rouler à peu près n’importe où: route, gravier, garnotte, single track… Pour les coureurs, je dirais que le gravel bike est au vélo de route ce que le trail running est à la course sur route!

Interlocuteur: Et c’est supposé être le fun ça???

 

J’ai appris par la suite que ce type de fun était appelé fun de type II par nos amis au sud de la frontière. Traduction libre: “ Le fun de type 2 est misérable pendant qu'il se produit, mais amusant en rétrospective. Il commence généralement avec les meilleures intentions et puis les choses s'emballent. Traverser le pays à vélo. Faire un ultramarathon. S'entraîner jusqu'à ce que vous vomissiez et généralement, faire de l'escalade sur glace ou de l'escalade alpine.

 

Préparation

Mon collègue de travail et ami Julien Ramond, avons décidé de s’inscrire à ce challenge en mode duo le 31 décembre dernier, le tout après une bonne discussion (et un peu de pression) avec mon coach, Marc-André Paillé. Le principal enjeu étant que le GBC500 arrivait 4 semaines avant l’Ultra Trail Harricana (UTHC65), un ultra marathon de course en sentier de 65km pour lequel j’étais déjà engagé. Oui, oui, l’UTHC aussi c’est du fun de type II. Coach m’a donné le go pour le GBC500, à la condition que je fasse les entraînements musculaires prescrits durant l’hiver et le printemps à venir. J’ai accepté la condition! Je peux d’ailleurs vous assurer que cela a fait toute la différence au niveau de la course et du vélo cette année. Je sais que ça peut avoir l’air plate de faire de la musculation, mais sérieusement  vous apprécierez encore plus vos sorties de course ou tout autre sport! 

Pour revenir au GBC et Julien, ni un ni l’autre avions de l’expérience avec le bikepacking, mais avions un profond désir de l’expérimenter. Durant les confinements, nous avons tous les deux écouté les Impossible Routes de Vegan Cyclist, ce qui a alimenté nos rêves. Je vous recommande d’ailleurs celle-ci si jamais vous êtes curieux! Nous avons également consulté des sites comme BikePacking.com, à la recherche du genre d’équipement requis pour ce genre d’événement. On dit d’ailleurs souvent qu’une image vaut mille mots, en voici donc deux pour vous donner une idée de ce que j’allais emporter avec moi durant ce périple. Le tout ajoutera un bon 25lbs à mon vélo!


36h avant l’événement

Avançons rapidement dans le temps. Nous sommes maintenant deux jours avant l’événement. Je viens d’aller consulter le médecin. Diagnostic: ce qui m’a poussé sur la joue gauche depuis les derniers jours est un abcès. Elle me prescrit donc des antibiotiques à prendre quatre fois par jour et me dit d’aller à l’urgence pour y être hospitalisé si cela ne commence pas à se résorber dans les 48 prochaines heures! Le GBC commence dans 36h… Ébranlé par cette nouvelle, je vais à la pharmacie pour recevoir ma prescription. C’est là que le pharmacien me dit que je pourrais avoir la diarrhée comme effet secondaire… J’ai alors échangé avec mon coach, je ne voulais pas annuler ma participation, mais en même temps je ne pouvais pas prendre ça à la légère! J’ai fini par échanger avec un pharmacien membre TOUT.TRAIL qui ne voyait pas vraiment de contre indications à ce que je participe à l'événement en prenant ces antibiotiques, en considérant ma santé avant tout bien sûr. Il m’a également recommandé de prendre des probiotiques et de me traîner des immodiums au cas où…

 

Le jour de J 

Je débute donc l’événement samedi matin comme prévu avec Julien en lui disant que j’allais voir comment le tout se déroulerait et qu’il y avait une possibilité que j’abandonne advenant le cas où la situation ne s'améliore pas. Autre ombre au tableau, mon tympan gauche a commencé à faire mal vers 4h ce matin-là. J’ai l’impression de faire une otite… Je reste tout de même confiant, comme mon abcès a déjà commencé à se résorber. C’est bon signe! J’ai donc roulé toute la fin de semaine en ingérant un cocktail de médicaments, ce qui n’est définitivement pas dans mes habitudes! Antibio, ibuprofènes, probiotiques et capsules de sel… Heureusement le tout a fini par se passer au courant de la fin de semaine.

Assez parlé de bobos et de choses plates, parlons maintenant de l’événement en soi. Cela fait définitivement partie des plus grandes expériences de ma vie! Comme tout événement d’endurance, il faut éviter de partir trop vite, trop fort au début. Nous commençons donc notre aventure tranquillement sachant très bien qu’il faut conserver notre énergie. J’aimais  d’ailleurs bien l’analogie du tube de pâte à dent de David Bombardier à cet effet dans l’épisode #67 du podcast TOUT.TRAIL. Ce dernier comparait notre énergie lors d’un événement d'endurance à de la pâte à dents dans un tube. Il mentionnait qu’il était beaucoup plus simple de minimiser notre consommation de pâte à dent, quitte à vider le tube vers la fin que de tout utiliser dès le départ et d’essayer d’en trouver plus tard lorsque le tube est vide. Belle analogie qui nous a bien servi!

 

Endroits visités

Les 14 points de contrôles étant localisés aux abords de différents commerces avaient tous deux objectifs:

 

  • Premièrement, prouver que nous étions passés par là en prenant un selfie devant une affiche du GBC500, puis envoyer cette photo à un numéro prédéterminé.
  • Deuxièmement, nous nourrir en nous faisant découvrir les différents produits locaux de l’Estrie.










Les endroits suivants sont ceux qui m’ont le plus marqués et voici pourquoi:

 

Les 3 grâces - Eastman - 166 km :  

Cela devait faire environ 10h déjà que nous avions débutés l’aventure lorsque nous sommes arrivés à ce point. La salade repas servie dans ce café bistro était tout simplement exquise, d’autant plus que nous avions mangés des barres énergétiques toute la journée. Cela nous a donné un regain d’énergie!

 

Cantine du Lac - Magog - 277 km : 

Un casse-croûte comme on les aime bien. Au menu? Tout ce qu’on veut!!! Je suis quand même resté sage en me prenant une grosse poutine, qui était plus que le bienvenue avec tous ses glucides, ses gras et son sel! Point boni, j’ai eu l’occasion de faire découvrir la poutine à mon partenaire, qui a immigré de France à Toronto il y a maintenant 20 ans et qui n’avait encore jamais mangé une poutine. Il avait entendu dire que la poutine à Toronto n’était pas très bonne, alors il ne s’y était jamais aventuré. Il a bien apprécié sa première poutine!




 

 

 

Passion Action - Forestville - 297 km :  

Passion Action, c’est un sex-shop! Je dois avouer que sur le coup nous n’avons pas trop compris ce que nous faisions là. Disons que l’endroit détonne avec tous les autres endroits que nous avons visités jusqu’à présent. Nous avons donc seulement pris notre selfie face au commerce, sans trop comprendre pourquoi ils nous envoyaient sur un boulevard défraîchis, alors que nous avions roulés sur tant de belles routes de campagne jusqu’à présent. C’est en discutant avec d’autres participants par la suite que nous avons compris ce qu’il fallait faire là-bas. Nous devions entrer à l’intérieur du commerce où ils nous offraient un membre masculin fait de chocolat!





 

Fromagerie de la station - Compton - 346 km : 

Un grilled cheese au fromage fin y était annoncé. Julien et moi salivions à l’idée de manger un tel repas, surtout que l’après-midi avait été chaude et que nous avions besoin d’un peu de réconfort. Déception à l’arrivée, nous n’avions pas lu qu’ils arrêtaient de faire des grilled cheese à 18h, il était 18h20… Nous avons dû nous contenter de morceaux de fromages et de saucissons qui n’étaient quand même pas mauvais! 

 

Le béret Rouge - Fitch Bay - 456 km :  

Dernier point de contrôle avant la ligne d’arrivée. La dame âgée et son mari français ont leur petit magasin où ils vendent des produits du terroir et des plats à emporter. L’ambiance est tout simplement magique. La dame suit l’arrivée des cyclistes sur son ordinateur et a ouvert son commerce que pour les participants du GBC500. Elle refuse même de servir des clients arrivant au magasin, prétextant qu’elle était ouverte du mercredi au dimanche uniquement (nous étions lundi). Elle nous servait, une tarte salée, essentiellement une pâte feuilletée recouverte d’oignons caramélisés par-dessus lesquels il y avait des tomates fraîches et un peu de fromage. Je ne sais pas si c’est parce que nous avions tous ces kilomètres dans les pattes, mais cette tarte était tout simplement exquise. Je vous recommande d’ailleurs de vous y arrêter si vous passez par là! 

  

Le parcours

Le parcours annonçait 85% de route de gravier et 15% de routes asphaltées. J’étais un peu déçu de voir que nous allions rouler sur de l’asphalte, mais j’ai fini par comprendre qu’à chaque fois que nous allions sur une section asphaltée, c’était pour nous amener vers un endroit plus épicé. Endurance Aventure, qui organise l’événement, à pour signature de garder des surprises aux participants! D’ailleurs le parcours officiel final n’a été publié que la veille afin de garder quelques secrets. Ceci étant dit, le plus gros secret était que le parcours final comprenait presque 7300 m de dénivelé, comparativement aux 5600 m annoncés. Pour revenir aux endroits plus épicés, nous avons eu le droit à plusieurs segments inusités à mon grand plaisir où nous passions d’une route asphaltée, à un rang en gravier, tournant sur une route en garnotte indiquée comme cul-de-sac, pour entrer dans une trail qui avait l’air de tout sauf d’une route avec ses grosses roches instables et ses trous de boue. Sinon, ce que je retiens le plus du parcours, c’est l’impression d’avoir fait un tour de montagne russe. Nous étions sans cesse en train de monter ou de descendre, il y avait très peu de plat. Les vitesses sont également très différentes, en montée il n’est pas rare d’être à 7 km/h alors qu’en descente on frôlait souvent les 70 km/h!

 

 

Dodo

Bien que nous nous soyons inscrits dans la version classique du GBC500, nous aurions pu nous inscrire dans la version robusto. La version classique permet de se loger dans des hôtels, auberges ou à la maison, tandis que la version robusto préconise l’autonomie, sans aide externe, ce qui était pas mal notre cas. 

Par soucis d’espace et de poids, Julien et moi avions optés pour dormir dans un sac de bivouac. Un sac de bivouac c’est essentiellement un imperméable à sac de couchage. Avis aux claustrophobes, ceci n’est pas pour vous! J’ai d’ailleurs eu mon petit moment de panique le premier soir alors que j'étais dans mon sac de bivouac et que je ne trouvais plus les zipper pour ouvrir le sac alors que j’étais à l’intérieur. J’ai donc pris un grand respir, je me suis calmé et j’ai fini par trouver l'extrémité de la fermeture éclair en tâtonnant le sac. J’ai par la suite positionné le chariot au-dessus de ma tête de façon à pouvoir le trouver aisément en cas de besoin. J’ai quand même apprécié mon expérience avec le sac de bivouac, mis à part que tout était mouillé par la rosée le lendemain matin et que je devais ranger le tout détrempé dans mes sacs afin de pouvoir repartir. Je crois que Julien ne pourrait pas en dire autant par rapport à son appréciation, alors qu’il a eu de la misère à trouver sommeil. 

 


Nous avons eu une chance inespérée le deuxième soir alors que le point de contrôle où nous avons décidé de terminer notre journée était une érablière. L’érablière Routhier est dans le milieu d’un bois et était ouverte en tout temps en libre service pour le temps du GBC500. À l’intérieur on y trouvait une boîte avec des petits sacs d’érable et un lavabo pour pouvoir remplir nos gourdes. Il faisait noir à notre arrivée et nous avions croisé aucun autre participant depuis au moins 2h. Nous avons donc pris la chance de dormir à l’intérieur, quitte à se faire déranger par d’autres cyclistes, ce qui n’arriva finalement pas!

 

 

Ami du lundi

Nous avons roulé la dernière journée en compagnie de Matt, un américain de Philadelphie, qui faisait l’événement en solo. Comme dans tout événement d’endurance auquel j’ai participé jusqu’à présent, on finit toujours par se regrouper dans l’adversité. Je crois que nous étions tous content de rouler ensemble. Je peux dire que ça a définitivement aider au moral pour passer à travers cette troisième journée, d’autant plus que le GPS de Matt fonctionnait encore 😅. Plus sérieusement, une belle synergie s’est développée entre nous trois et nous étions bien heureux de franchir la ligne d’arrivée ensemble pour y savourer un bon repas d’après course accompagné d’une excellente bière de la microbrasserie des Cantons.

 

Conclusion

En terminant, j’ai vraiment adoré ma première expérience en bikepacking. Le sentiment de liberté et de découverte que cela m’a procuré est tout simplement phénoménal. Je songe déjà à m’y inscrire l’an prochain, surtout que je sais maintenant qu’Endurance Aventure modifie le parcours à chaque année. Ne vous surprenez donc pas si j’essaie d’en convaincre certains d’entre vous à me joindre à l'aventure l’année prochaine!