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UltraTrail Harricana du Canada 2022

par Suzie Boucher-Lemay, Justine Gagné & Geneviève Asselin-Demers

Mon premier UTHC 65 km

par Suzie Boucher-Lemay

Ceci est mon récit de coureuse ordinaire pour ma plus longue course à vie, soit le 65 km de l’ultra trail Harricana 2022. Le matin de la course, je me sens bien. L’entrainement qui m’a mené à la course a été irréprochable, je n’ai pas de bobo, j’ai bien dormi dans la semaine précédant la course, je suis de bonne humeur. J’ai lâché prise sur les prévisions météo, qui annoncent une journée chaude et humide (la chaleur et moi, on ne s’aime pas). Je ne contrôle pas la météo, mais je peux contrôler ma gestion de course. 8h30, le départ est donné, je pars dans la 3e vague avec des amis Tout.Trail. 

Crédit : David Moura

Entre le départ et le ravito 1 (Geai bleu – km 8) : Le sentier est roulant, le paysage est magnifique. C’est beau le parc des Hautes-Gorges ! Ça avance bien et je ne m’emballe pas. Mon sac d’hydratation se vide au complet dans mon dos au 1er kilomètre. Génial… Heureusement c’était un back-up, mais je suis détrempée ! Je n’arrête pas au ravito 1, j’ai toute ma bouffe et j’ai suffisamment de liquide dans mes gourdes pour me rendre au ravito 2. 

Ravitos 1 à 2 (Coyote – km 22): Selon le profil de la course, je pensais que ça allait monter plus que ça, mais finalement ça se court bien. Mes jambes vont bien, le moral est bon, je garde un rythme confortable, car c’est long 65 km ! Je suis mon plan de manger aux 45 minutes. La chaleur monte, mais ça demeure gérable. Je me rafraîchis dans quelques cours d’eau. Au ravito Coyote je remplis mes gourdes et je prends du fromage en crottes (ça prend des protéines!), mais ça me roule dans la bouche…

Ravitos 2 à 3 (Épervier – km 41): Ce fut le pire segment de la course pour moi. La chaleur me semble suffocante et me donne des nausées qui sont amplifiées par l’effort en montée. Je dois abaisser ma fréquence cardiaque. Je continue à courir sur le plat et dans les descentes, donc j’avance quand même bien, même si je dois ralentir. Je bois seulement de l’eau (mon Gatorade me donne mal au cœur) et je ne suis pas capable de manger pendant un bon 1h-1h30. J’ai vraiment soif, mais je ne peux pas trop boire, car ça me donne mal au cœur. J’essaie de prendre un morceau de gingembre confit (que je traîne avec moi en raison de nausées lors d’une course précédente), mais il me donne un énorme haut le cœur. L’ironie de la chose me fait bien rire. Vaut mieux en rire qu’en pleurer… Je me concentre sur la magnifique forêt qui m’entoure pour évacuer les pensées négatives. Le prochain ravito est indiqué à 22 km de la fin. Quand j’aperçois la pancarte « 22 km », aucun ravito en vue, ce qui me décourage grandement. Je suis sur une route de gravier relativement plate, mais je n’ai pas d’énergie et je n’ai aucune envie de courir. Je négocie avec mon cerveau pour faire des intervalles marche / course jusqu’au ravito, qui est finalement environ 500 m plus loin (ouf!). En arrivant, une bénévole me demande si je veux me faire vaporiser de l’eau pour me rafraîchir (OUI!!!) et une autre me propose une petite douche d’eau froide (OH MY GOD OUIIIIIII!!!!!). Je rentre dans le ravito et je suis surprise de voir Éric, un ami de Tout.Trail avec qui j'ai pris le départ ! Je remplis 2 gourdes et ma flasque de Brix, je prends un verre de coke et on décide de repartir ensemble, car il est aussi dans une mauvaise passe. 

Ravitos 3 à 4 (Split Naak – km 47) : Le prochain ravito est 8 km plus loin. On a une montée de 200 m de D+, un bout plat et une descente à faire. On marche la montée d’un bon rythme, mon estomac reprend tranquillement du service et je suis capable de prendre un gel. On recommence à courir après la montée et on court jusqu’au ravito suivant, à la grande surprise d’Éric. Pas un pace de feu, mais on avance ! Au ravito Split, je découvre que les oranges rentrent bien et j’en enfile plusieurs avec un verre de coke. 

Ravitos 4 à 5 (Montagne Noire – km 55) : On entame la montée de la montagne Noire. Ça nous semble interminable ! Je manque de gaz en montée, Éric se met devant et je le suis. La montée se fait en plusieurs tronçons et on est exaspérés à chaque fois qu’on tombe sur un nouveau segment qui monte, mais on avance et on ne lâche pas. Je réussis à prendre un autre gel. On entame finalement la descente et j’ai enfin du gaz. Je prends les devants et on descend à un bon rythme pour finalement arriver au dernier ravito, qui est à 8 km de l’arrivée. On fait un autre ravito express, je me bourre d’oranges, je remplis une gourde de coke et on repart pour continuer la descente de la montagne Noire. 

Ravito 5 à l’arrivée : En quelques minutes c’est réglé, on arrive en bas de la montagne, propulsés par le boost de sucre et de caféine du Coke. On se trouve bien hot, on a dépassé plusieurs coureurs, mon estomac va bien, mais nos jambes sont complètement détruites ! Éric calcule qu’on est capables de finir en moins de 9h. Ça nous donne un objectif. On entame ensuite la section finale du parcours, où on doit affronter des pistes de ski de fond avec un profil en montagnes russes. Je réussis à avancer même si je n’ai plus de jambes, j’en suis encore surprise. On chiale à chaque fois qu’on arrive à une autre montée (encore ?!?) et ça fait du bien d’en rire. On voit finalement la tant attendue pancarte « 1 km » et on est fous de joie. On arrive à la dernière section, il y a une petite montée pour arriver à la ligne d’arrivée mais on court même si on n’a plus rien dans les jambes. Après 8h55 d’effort, on passe finalement la ligne d’arrivée accueillis par Marc-André sous les applaudissements et les encouragements de la gang de Tout.Trail. On l’a fait ! Mon ami Seb, qui n’a pu prendre part à la course à cause d’une blessure, nous accueille même avec une canette de cream soda bien froide ! Le rêve !

En rétrospective, je suis très satisfaite de ma course, même si ce fut plus long que prévu. Les conditions étaient loin d’être idéales, surtout pour moi qui tolère très mal la chaleur, mais j’ai réussi à rester en mouvement tout le long de la course. Je n’ai pas eu à prendre de longues pauses ou à ralentir considérablement comme lors de ma dernière course à la chaleur (QMT 50), où j’ai beaucoup appris. J’ai adapté ma nutrition (ouste les aliments solides!), j’ai donné des pauses à mon estomac quand rien n’allait plus (au lieu de m’entêter à essayer de manger), j’ai géré mon effort pour diminuer ma fréquence cardiaque et je me suis rafraîchie dans chaque cours d’eau que j’ai croisé. J’ai terminé la course avec les jambes complètement détruites (beaucoup plus qu’au QMT50), signe que j’ai été capable d’en donner beaucoup, même si c’était difficile. Maintenant, cap sur le Bromont Ultra 55 km dans un peu moins d’un mois, où la température devrait finalement me donner un break !

 

UTHC 80 km - DNF

par Justine Gagné

Crédit : Ian Roberge

Une décision crève cœur, mais la meilleure que je pouvais prendre cette journée-là. Ça faisait 2 mois que mon corps m’envoyait des signaux pour me dire qu’il avait besoin de repos, autant sur ma santé physique que mentale, mais je ne l’écoutais pas. Cette journée-là, il me l’a fait comprendre. Après un beau 25 km de course à bonne allure, les nausées ont pris le dessus et m’ont obligée à ralentir, à marcher, même. Quelques kilomètres plus tard, c’est le genou qui a lâché. Rendue-là, j’ai décidé que c’en était assez. Hypothéquer mon genou pour l’année, ça ne me le disait pas trop… Mon objectif, c’était de prendre le départ. Je l’ai pris, et j’en suis bien fière! Je ressors de cette course-là avec un gros sourire et je suis juste contente d’avoir pu courir quand même 40km dans ces beaux sentiers, avec des décors de fou! 

Et merci à mes amis et ma famille d’avoir été là, ça remonte le moral en titi! 

See you next year UTHC!

 

LONG RÉCIT de mon 125 km UTHC

par Geneviève Asselin-Demers

Une première course qui débute sur l’heure du dîner, au gros soleil tapant. Un léger stress se faisait sentir depuis le lever du soleil. Étendue dans mon lit en me disant «Geneviève, reste couchée et minimise le poids sur tes jambes… tu vas partir bientôt pour 18, 19- 20 heures de course.» Après un bon déjeuner, quelques heures de travail et un dîner, c’est l’heure de partir pour le site du départ, soit 50-55 minutes de voiture et hop, c’est maintenant le temps de voir si toute la préparation, physique et mentale, sera au rendez-vous.

On me prévient et on me répète de ne pas partir devant et de rester calme sur les premiers km très roulant et descendant sur un bon 4km. Je me parle et reparle, j’écoute la respiration des coureurs à proximité de moi qui cherchent déjà leur air avec cette chaleur intense, je reste à l’écoute de mon corps et j’entre dans le single track avec une super belle position pour moi qui voulait courir ces premiers km au petit trot en compagnie de mon ami Jean-Pierre, avec qui je passe les 25 premiers km. 

Je change de partenaire pour la montée du Mont des Morios, la plus technique que j’ai pu faire à ce jour. Je reste conservatrice et j’arrive en haut du mont, très confortable avec mes jambes qui picotent légèrement, mais où je suis en plein contrôle. Je redescends assez rapidement pour aller rejoindre ma pacer au prochain ravito où j’ai très hâte de la croiser. En compagnie d’un gentil garçon, nous sommes 3 pour monter la Noyer, à discuter, à rire, à observer le magnifique coucher de soleil. Rendus au sommet, la belle lune orange feu nous offre un spectacle incroyable lors de la descente. 

Quelques minutes seulement à la Chouette pour ensuite emboîter le pas, la frontale sur la tête, un peu trop excitées dans nos discussions de filles, un embranchement loupé et hop, nous montons un autre sommet avec quelques km de plus. Un 30-40-50 minutes de perdues, c’est à ce moment que j’ai eu à me parler, à ne pas rester dans ce sentiment négatif d’échec. Kim a su garder la tête froide, me ramener sur le bon chemin avec son beau sourire. Nous retrouvons un bon pace, de belles descentes, les jambes sont là et on roule jusqu’au ravito des Hautes-Gorges où je sais que je la perdrai. J’avais si peur d’arrêter au ravitaillement, car plusieurs m’avaient avisé que les DFN (did not finish) arrêtaient à ce ravito, donc par peur, je n’arrêtais que le temps de remplir mes bidons, une petite poignée de nourriture et je repartais. 

Pour les Hautes-George, je pouvais avoir une équipe de soutien avec mon drop bag. Ça faisait plusieurs km que je parlais de mon sac avec mon Matéina (comprenant du matcha et qui m’aiderait à passer la nuit), mes barres de protéines, pain aux bananes, brownies, mes pompes d’asthmes au cas où un bronchospasme ne survienne durant la nuit en raison de la fatigue, mes pilules d’épilepsie à prendre aux 12 heures et encore plus du grilled cheese que j’avais envie d’en manger. Bref, j’ai TOUT oublié, je suis partie comme une peanut et à environ 100m, je réalise que je n’ai pas ma frontale, je ne voyais pas mes pieds et que j’avais oublié mon grilled cheese! Je retourne à la tente, je prends ma frontale, ma pacer me donne mon demi grilled cheese et je repars. C’est rendu à environ 1km que je réalise que je n’avais pas juste oublié ça mais aussi TOUT le contenu de mon drop bag! Mais je suis trop loin, alors je vais devoir faire confiance à la nourriture des ravitos. Deuxième passe difficile du côté du mental, mais je me replace très rapidement et je reprends mon focus: « Geneviève, ta mission est de compléter cette mythique course d’ultra longue distance avec le sourire». Alors je me remplis de positif, je pense énormément à mes filles, je les entends rire et dire « Cours plus vite maman! ». 

Je mange des petites patates, du fromage en grains et un autre grilled cheese au Coyote et c’est à cet endroit que j’ai décidé d’ouvrir la machine à plein gaz! Mes jambes étaient là, mon énergie encore au top, plus que 2 belles montées avec l’Épervier et la Montagne noire et le tout était dans la poche. J’ai recommencé à remonter les positions une à une, comme le petit bonhomme Pac-Man, avec le sourire aux lèvres et l’énergie dans les jambes. J’ai croisé des amis: un porc épic, une jolie mouffette, une perdrix, un lièvre, mais pas d’ours à l’horizon. HOURRA! À chaque chute d’eau ou rivière que je passais, je me concentrais sur ce bruit que j’adore et qui me fait un bien immense, un calme instantané à l’intérieur de moi et qui me faisait réaliser que j’allais accomplir cette aventure avec brio! Me voilà à 1 km de la ligne d’arrivée, ça fait déjà 3 km que j’entends Marc-André Paillé au micro et j’ai si hâte qu’il prononce mon nom. Je cours plus vite pour enfin franchir cette ligne d’arrivée les 2 bras dans les airs avec cette fierté de mission accomplie. Je suis encore sous ce gros nuage d’euphorie de cette 3ième place sur le podium femme et cette 10ième place overall